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Quand l’IA s’infiltre dans le monde de la parfumerie

Entre tradition et innovation

Quand l’IA s’infiltre dans le monde de la parfumerie  Entre tradition et innovation

L’art de la création de parfum a toujours été accompagné d’un voile sacré, voire magique. Peut-être qu’il est dû à son histoire qui remonte à l’Antiquité où les Égyptiens confectionnaient des baumes parfumés pour des rituels religieux. Aujourd’hui, la conception de fragrance prend un tout autre visage avec l’intégration de l’intelligence artificielle chez les plus grandes marques de parfumerie. Une pratique autant révolutionnaire que controversée. Dans un contexte de concurrence accrue dans l’industrie olfactive, les entreprises investissent dans les intelligences artificielles pour qu’elles puissent prédire, comprendre et analyser les odeurs qui seront un succès commercial. Pour ce faire, elles sont entraînées avec des données comme des formules et des ingrédients des réussites antérieures et des tendances industrielles pour ainsi pouvoir proposer des recettes prospères. L’idée ne serait pas de remplacer les nez, ces maîtres-parfumeurs qui sont chargés des compositions parfumées, mais d’alléger leur travail pour qu’ils puissent davantage se focaliser sur l’amélioration des fragrances plutôt que sur la recherche de nouvelles combinaisons. 

@tinaprokas Would you wear a fragrance that AI made you? It’s located inside @The Fragrance Shop #fragrancetiktok #thingstodoinlondon #aiperfume #thefragranceshop original sound - Tina Prokas

L’un des précurseurs en la matière s’agit de Paco Rabanne qui a développé l’eau de cologne Phantom avec l’aide d’un algorithme en 2021. Ce dernier se serait basé sur 45 millions de lectures cérébrales de jeunes hommes âgés entre 18 et 35 ans afin de fournir les ingrédients clés qui aideraient à booster sa confiance en soi. De plus, l’intelligence artificielle aurait poussé les nez à oser des quantités considérées comme démesurées dans les règles classiques de la parfumerie. « Loc Dong, notre parfumeur, souhaitait utiliser l’acétate de styrallyle, molécule vintage verte et florale, qui rappelle l’odeur du gardénia. L’IA a permis d’amplifier son dosage et de l’associer à un accord crème de lavande inédit, pour créer un parfum aromatique futuriste », raconte Arnaud Montet, directeur du département Human & Consumer Insights d’IFF. Du côté des Pays-Bas, la start-up EveryHuman crée des senteurs uniques en quelques minutes à l'aide d'un questionnaire et d'algorithmes. Un concept qui s’inscrit dans l’air du temps où les consommateurs sont friands de produits et de services spécifiquement personnalisés.

Cependant, certains expriment leur doute quant à la légitimé de la place de la technologie au sein du monde de la parfumerie. Julia Gemmellaro Lacoste, parfumeuse émérite chez Aromwave, a déclaré dans une interview avec dmb que, quelle que soit son avancée, l’IA ne peut pas remplacer l’émotion et la sensibilité humaines dans la création de parfums. Selon l’experte, les intelligences artificielles seraient incapables de reproduire les émotions, les histoires humaines que les odeurs portent. Comme la fameuse «Madeleine» de Proust l’exprime très bien, l’odorat dispose d’une place primordiale dans l’expérience humaine. Porteur de souvenirs, accessoire du bien-être, expression de son identité, le parfum remplit diverses fonctions dans notre quotidien. Une autre inquiétude des nez est la possibilité que les IA renforcent les problèmes des contrefaçons de parfums, rendant davantage facile la conception de copies bon marché des fragrances les plus célèbres. L’usage de la technologie pourrait également amener à une standardisation des compositions et une mort lente de la créativité et de l’innovation.