Marine Serre et ce que vous avez raté à Pitti
Une édition vaguement aristocratique - même pour la créatrice française anarchique
13 Juin 2024
Le Pitti Immagine Uomo, qui précède immédiatement la Fashion Week de Milan, s'est déroulé cette année dans une ambiance plus aristocratique, renforcée par les défilés de Paul Smith et de Marine Serre hier et avant-hier, et par celui de Pierre-Louis Mascia qui aura lieu quant à lui aujourd'hui. Les défilés de Smith et de Serre, qui ont attiré de nombreux visiteurs, ont peut-être été affectés par l'influence sartoriale de Pitti, tous deux étant dominés par des coupes formelles mais jamais sévères, des silhouettes nettes et définies, et une certaine forme de fausse nonchalance polie qui est désormais l'étalon-or de la mode masculine d'aujourd'hui. En réalité, de façon presque surprenante, le défilé de Serre est rapidement passé du défilé masculin que tout le monde attendait à une démonstration de virtuosité dans laquelle la créatrice a également présenté des vêtements féminins et une série de looks créés à partir de matériaux de récupération (la base des costumes blancs du final était de la literie vintage), élargissant ainsi considérablement l'étendue de sa collection.
Le défilé organisé à Villa di Maiano, dans les collines de Fiesole, a été sans nul doute d'une poésie unique grâce à la beauté du paysage et à la parfaite lumière dorée du coucher de soleil - très différente du soleil franchement aveuglant qui éclairait la Fortezza da Basso le matin. Présentant une série de silhouettes classiques, mais cette fois contenant une dose plus légère d'éco-futurisme, Serre a opté pour plus de rigueur, qui a toutefois explosé dans l'exubérance stylistique que nous connaissons dans le cas de certains looks, comme la veste recouverte de fleurs. Parmi les looks les plus intéressants, nous retrouvons les robes reconstruites à partir de sacs à dos et une série de pièces en cuir brillant, couvertes de croissants de lune et présentées dans des ensembles monochromes (le meilleur étant celui en cognac) mais aussi en version " cassée " combinant un pantalon en cuir brillant et une chemise bleue. Autre point fort, les vêtements d'extérieur, notamment une veste en laine écossaise sans revers, avec des passepoils en cuir et un motif en patchwork sur le bas, et une robe en filet à double épaisseur avec des mouchoirs froissés pressés à l'intérieur pour dissimuler le corps, très "margielesque". Ailleurs, le motif patchwork se poursuit sur une série de chemises au col hyper 70's, tandis que plusieurs imprimés sont directement issus de ceux de la collection masculine FW23 de Serre.
Loin des podiums, dans la Fortezza da Basso, les invités habituels du Pitti ont suivi un chemin similaire d'anarchie sartoriale. En excluant les costumes basiques et conformistes, toujours présents en abondance, nous avons pu constater un certain goût pou la combinaison de pièces de tailoring et d'accessoires plus raffinés avec des costumes militaires, des salopettes vintage et de solides sacs en toile, ayant au moins cinquante ans de carrière honorable derrière eux. L'effet n'est pas très nouveau, mais il est certainement plaisant. De nombreux foulards, des vestes en jean, des polos en maille et un certain citationnisme de l'Amérique des années 50 à travers des casquettes de marins, des uniformes de la marine, des hauts rayés. Les célèbres "paons" du Pitti (qui ont souvent l'air de voyageurs temporels surgis des années 1920) ont été relativement sobres cette année d'informalité, échappant ainsi à l'affectation. Ce qui est sans doute une bonne chose.