La Cendrillon moderne de Gaultier selon Simone Rocha
Le premier défilé de haute couture de la designer irlandaise explore l'univers coquette
25 Janvier 2024
Pour Simone Rocha, il a été facile de prendre les rênes de Jean Paul Gaultier. Plongée dans les archives de la maison, elle a découvert des créations avec le crochet traditionnel irlandais, des corsets en satin et des teintes roses, se sentant immédiatement chez elle. Présentée à Paris hier après-midi, sa première collection de couture a uni la verve individualiste du crayon de Gaultier, une légende de l'industrie de la mode, à la sensibilité hyper-féminine de la jeune designer, écrivant une nouvelle page de succès dans le projet collaboratif de la maison. Depuis l'annonce, l'été dernier, que Rocha occuperait le rôle de designer invitée pour la collection Haute Couture SS24, la tendance coquette a connu une ascension irrésistible. Nœuds et perles ont orné des baskets, des accessoires et des tenues entières, devenant plus qu'une tendance, un véritable genre à part entière. En ajoutant des transparences et de la brillance à son esthétique douce, souvent liée au monde de la maternité et des mariages, la couture de Rocha a incarné le mariage parfait entre la féminité et l'érotisme. L'audace et la sensualité ont heurté la tendresse du rose bonbon, comme si une princesse d'il y a quelques siècles s'était présentée à une fête de 2024.
Tous les codes stylistiques de Jean Paul Gaultier étaient là : corsets, soutiens-gorge en cône, pulls à rayures et chapeaux de style marin, réinterprétés selon les règles de la designer irlandaise. Les cônes sont devenus des roses, les rayures millerighe sont devenues des bandes de satin virevoltantes, les corsets se sont froissés de plus en plus pour former les silhouettes des paniers du 18e siècle. Des mètres et des mètres de tulle et de satin ont été superposés pour créer des looks couvrants et vaporeux, tandis que d'autres ont laissé la transparence voler la vedette. Des roses métallisées, symbole d'un geste que l'enfant terrible de la mode avait l'habitude de faire après ses défilés, sont apparues dans les mains de certaines mannequins, offrant des fleurs aux muses qui avaient défilé pour lui. Jusqu'à quelques instants avant la présentation, les invités entre les sièges du siège de la maison présageaient l'union inconvenante de mondes trop différents, mais à la vue des premiers looks de la collection, toutes les perplexités se sont atténuées. Exemple glorieux de l'attraction indéniable entre les opposés, le jeu de contrastes présenté par Rocha a donné vie à une imagination élégante et sensuelle, laissant tous les présents avec un sourire imprimé sur le visage.
Il n'y avait pas seulement du rose et du tulle. Des looks entièrement noirs ont pris la forme de robes évasées, de tailleurs géométriques et de pantalons sur mesure à associer à des hauts en appliqué métallisé, tandis que des strass en cristaux pendaient des soutiens-gorge couleur chair formant des coques en forme de coquille. Aux côtés du rose, du blanc cassé et du noir, des accents profonds de bleu et de vert sont apparus à différents moments, tandis que le bleu ciel ajoutait des manches ballon à un body sans manches. Le souci du détail a atteint jusqu'aux lobes et aux talons des mannequins, décorés de touffes de cheveux tressés, peut-être une référence à une coutume séculaire liée au monde des superstitions nuptiales, tandis que les chaussures, des plateaux en plexiglas transparent, dévoilaient leurs pieds imitant les talons de cristal emblématiques d'une des princesses les plus vanille de l'histoire. Projetée d'un millénaire et demi plus loin, entre les médias sociaux et la tendance coquette, celle-ci n'est pas une Cendrillon ordinaire.