Comment la culture de bureau a-t-elle changé en 2024 ?

Les memes représentent souvent la réalité qui nous entoure. L'année 2024, marquée par le chaos, la violence, l'incertitude et la frénésie, a vu émerger chez beaucoup un désir de légèreté qui, par moments, se traduit par un détachement critique et libérateur du monde capitaliste. Une sorte de rejet qui utilise l'arme de l'évasion avec des teintes nostalgiques d'un monde simple et spontané, ou au contraire, d'un monde lointain et utopique. Le partage massif des memes se moquant de la culture de bureau témoigne d'une nécessité d'échapper à la réalité grise axée sur le profit, que nous pensions avoir commencé à changer pendant la pandémie. Les années de confinement ont apporté une grande prise de conscience parmi les travailleurs, qui reconnaissent maintenant la valeur de la flexibilité du travail pour atteindre un équilibre optimal entre travail et vie personnelle.

Né par nécessité pendant le Covid, le télétravail est désormais devenu une pratique courante dans les entreprises et de plus en plus demandée par les employés. Selon Statista, 67,8% des employés du secteur technologique dans le monde ont travaillé totalement ou principalement à distance ces dernières années, suivis par les employés du secteur financier (50,6%) et de l'assurance (48,7%). En Italie, les chiffres sont également très élevés : selon l'Observatoire du Politecnico de Milan, le "travail agile" continue de croître dans les grandes entreprises et les microentreprises, tandis qu'il enregistre une baisse parmi les petites et moyennes entreprises (PME) et dans le secteur public. En 2024, il a concerné 3,5 millions de travailleurs italiens, marquant une diminution de 0,8% par rapport à 2023. Cependant, une reprise de 5% est prévue pour l'année prochaine. Toujours selon l'étude du Politecnico d'octobre 2024, on lit que « 73% des travailleurs qui utilisent le travail agile s'opposeraient si leur entreprise supprimait cette forme de flexibilité. Plus précisément, 27% envisageraient sérieusement de changer de travail, 46% s'efforceraient de faire changer d'avis leur employeur. Pour compenser au moins en partie la perte de la possibilité de travailler à distance, l'entreprise devrait offrir une plus grande flexibilité horaire ou augmenter le salaire d'au moins 20%. »

Malgré le succès du télétravail, depuis janvier 2024, plusieurs grandes entreprises mondiales - dont Google, Amazon, Meta et Apple - ont introduit des politiques de retour au travail en présentiel imposant au moins trois jours de travail au bureau chaque semaine. Dans un curieux paradoxe, Zoom – le géant qui a facilité le télétravail pendant la pandémie de COVID-19 – a établi sa propre règle qui exige des employés qu'ils soient au bureau deux fois par semaine, tandis qu'on se souviendra que X a adopté, depuis l'acquisition par Elon Musk en 2022, une politique stricte du "seulement au bureau", ordonnant à ses employés de faire toute leur semaine de travail directement depuis les sites de l'entreprise.

La semaine de travail est également abordée en termes de réduction du temps de travail. De nombreuses expériences menées à travers le monde démontrent que réduire la semaine de travail de cinq à quatre jours augmente la productivité et le bien-être des travailleurs. Ces dernières années, en Europe, des pays comme l'Islande, l'Espagne, la Suède, la Finlande et le Royaume-Uni ont lancé des projets sur la semaine de travail réduite avec environ « 71% des employés [qui] ont déclaré avoir des niveaux plus bas de burn-out et 39% [...] se sentir moins stressés » comme le rapporte Geopop, tandis que « les revenus des entreprises sont restés inchangés [...] augmentant même légèrement en moyenne de 1,4% ». Et en Italie ? Bien que le nombre d'entreprises qui expérimentent de nouvelles formules d'organisation du temps de travail augmente chaque année (la première étant Intesa San Paolo suivie par Luxottica, Sace et Lamborghini), dans notre pays, il n'y avait jamais eu de modification législative ni d'expérimentation à grande échelle au niveau national jusqu'en novembre 2024, lorsque un accord a été conclu sur le renouvellement du contrat national des employés de la fonction publique. Cet accord, rapporte le Post, prévoit « des modes d'organisation du travail plus flexibles et innovants, [...] en particulier, il a été inclus la possibilité pour les fonctionnaires de demander la soi-disant “semaine de travail de quatre jours”, avec le même salaire et le même horaire hebdomadaire ». Toutefois, l'innovation de la semaine de travail courte a aussi ses détracteurs : la Grèce, en juillet 2024, a introduit la “semaine longue”, c'est-à-dire la possibilité pour certaines entreprises d'augmenter à six jours de travail par semaine. Le gouvernement de droite a justifié cette décision en affirmant vouloir donner un nouvel élan à la croissance économique.

Que ce soit Elon Musk, Google, Zoom ou la Grèce, il existe toujours une contre-tendance à l'amélioration de l'équilibre travail-vie personnelle. Ainsi, les memes contre la vie de bureau prennent de l'ampleur, en réponse à une vie professionnelle qu'il faut vivre mais qu'on ne veut pas vivre de cette manière. L'année dernière, « Les êtres humains ont vu cela... et ont inventé excel » a fait des millions de vues et a été décliné dans toutes les langues du monde, tout comme une infinité d'autres phrases ironiques sur la réalité de la vie de bureau. En cette période précédant les fêtes, les contenus sur la lourdeur du travail en entreprise avant Noël et sur le désir d'évasion se multiplient. Le succès du meme Chill Guy s'inscrit dans une optique d'évasion et, parfois, de désinvolture face à un monde frénétique : de nombreuses choses se passent souvent de manière désagréable, « mais tu es juste un gars chill qui profite de ta journée ».