La Côte d'Azur devient le terrain de jeu d’Hollywood avec « The Substance »
La petite touche à la française qui ajoute un je ne sais quoi à ce festival du gore
13 Novembre 2024
À moins que vous n’ayez vécu dans une grotte ces dernières semaines, que votre connexion internet soit à revoir ou que vous éprouviez une aversion totale pour le cinéma, il est impossible que vous n’ayez pas entendu ne serait-ce que le titre de celui que l’on surnomme déjà le film de l’année : The Substance. Mettant en scène une Demi Moore (qui vient d’ailleurs de souffler ses 62 bougies) plus brillante que jamais, ce body horror qui semble pourtant bien américain, made in Hollywood et tutti quanti, a pourtant bel et bien été filmé sous le soleil du sud de la France. En effet, Cannes, Antibes, Carros et Saint-Laurent-du-Var ont pendant une centaine de jours fait office l’un après l’autre de décors à ce festival de l’horreur et du gore qui a déjà conquis les cinéphiles du monde entier quelques jours seulement après sa sortie dans les salles. Si la production est bien britanno-américaine, le film est empreint d’une french touch indéniable apportée par son setup, mais aussi par sa réalisatrice française, Coralie Fargeat et son équipe de production. Faisons donc le point sur comment la France a réussi à s’incruster dans ce chef-d’œuvre hollywoodien qui cartonne aux quatre coins du monde.
Si l’histoire se déroule à Los Angeles, aucune scène n’a été tournée sur le territoire américain, mais bien entre des studios en île de France et sous le ciel bleu des Alpes-Maritimes. À l'origine, c’était l’Europe de l’Est qui aurait dû accueillir les équipes de tournage et faire office de toile de fond au film, mais c’est finalement sur le sud de la France et ses palmiers semblables à ceux de la Californie que la production s’est rabattue, pour des raisons budgétaires. L’idée de Fargeat, selon le producteur exécutif Nicolas Royer, c’était de « ne surtout pas faire croire qu’il s’agissait bien de Los Angeles, mais plutôt de trouver des décors qui évoquent Hollywood et la Californie ». C’est ce que la production à fait en s’appuyant sur le symbole des palmiers. Ainsi, les allées de la croisette se sont transformées en rues typiques des USA, le théâtre Anthéa est devenu l’hôpital qui accueille l’héroïne, tandis que le parking de Marineland et le stade nautique d’Antibes ont vu Demi Moore et Margaret Qualley déambuler. Au Festival de Cannes (là où le film a remporté le prix du scénario), le public a carrément été surpris d’apprendre que le film avait été tourné en France.
Mais le décor n’était bien entendu pas la seule petite French touch : l’équipe de production et de réalisation était principalement composée de Français, mais surtout de Françaises. En effet, The Substance est un film profondément féministe tous les niveaux : il narre l’histoire d’une femme qui se perd à force de trop vouloir respecter les attentes esthétiques de la société et des hommes, une histoire racontée par des femmes, pour les femmes. Réalisatrice, superviseuse de la régie, chef décoratrice … le tournage était principalement dans les mains de girl boss du cinéma. « Il y avait beaucoup de femmes qui 'tenaient' le tournage » explique Robert Pizzelli, régisseur du film. Une équipe féminine qui a d’ailleurs conquis les stars du film, emballées à l’idée de travailler avec une réalisatrice française, ainsi que de tourner en France, pays qui fait généralement rêver les Américains en quête de clichés européens. Bien au-delà de son décor et de son ADN hollywoodien, The Substance incarne avant tout la vision audacieuse d'une cinéaste sur le thème universel de l'image de soi, capable de toucher et d’enclencher une réflexion chez n’importe quel spectateur, Américain ou pas. Si son arrière-plan représente une Amérique dans toute sa splendeur, avec ses clichés et ses attentes sociétales peu réalistes, le film aurait probablement pris une toute autre direction s'il avait été tourné aux États-Unis. Pourtant, à en lire les réactions élogieuses de la presse écrite et des médias américains, il est évident que rien ne serait à changer à cette grosse production, et surtout pas sa toile de fond.