
5 choses que Hubert de Givenchy a apportées à la mode
Aujourd'hui, le créateur aurait fêté ses 98 ans
20 Février 2025
Le 20 février 1927, il y a presque 100 ans, Hubert de Givenchy, naissait à Beauvais dans une famille de la noblesse française. Le couturier qui s’est éteint en 2018 à l’âge de 91 ans aura mené une carrière longue et prospère, apportant à la mode française des éléments qui encore aujourd’hui la rendent unique. Après des débuts chez Robert Piguet (où il précède Marc Bohan) et un passage chez Lucien Lelong (quand Pierre Balmain et Christian Dior s’en allèrent), Hubert de Givenchy rejoint les rangs d’Elsa Schiaparelli, chez qui il créera pendant quatre belles années des bijoux, des accessoires, mais surtout des vêtements. En 1951, il décide de voler de ses propres ailes en ouvrant sa maison de couture éponyme à Paris, où il présentera sa première collection un an plus tard. Si ce lancement est un réel succès, le tournant le plus marquant de sa carrière reste sa rencontre avec son idole, qui se transformera par la suite en mentor et ami: Cristobal Balenciaga. C’est d’ailleurs précisément grâce à ce genre d’amitié et de rencontre fortuite qu’au fil des années, monsieur De Givenchy a construit sa carrière un fil à la fois. Afin de célébrer l'anniversaire de ce maître couturier, faisons un retour sur ces rencontres qui donnèrent naissance aux créations les plus iconiques de la Maison Givenchy, à travers 5 moments clés qui ont rendu le passage d’Hubert de Givenchy dans le monde de la mode inoubliable.
La petite robe noire d’Audrey Hepburn dans Diamants sur canapé
C’est en 1953 que les chemins des deux artistes se croisèrent. Alors que le couturier attend patiemment dans son studio l’arrivée de Katherine Hepburn, c’est une autre Hepburn qui passe la porte. Entre Audrey et Hubert, l'alchimie opère sans se faire attendre. Les yeux de biche et l’élégance naturelle de l’actrice vont inspirer au créateur des robes et tenues toutes plus raffinées les unes que les autres, alignées avec le fil conducteur et les créations de sa maison. Accompagnée d’habitude dans ses choix stylistiques au grand écran par la costumière Edith Head, l’actrice décide pour le film Sabrina de choisir elle-même les vêtements qu’elle portera dans le long métrage. La légende raconte que l’épouse du réalisateur du film Billy Wilder aurait envoyé Hepburn chez la maison Balenciaga, alors dirigée par monsieur Balenciaga lui-même, qui, trop occupé pour pouvoir s’occuper de cette mission, l'envoya chez son voisin d’en face Givenchy. Grâce à cet heureux hasard, les tenues de Sabrina prennent vie, avec la robe blanche en organza brodée d'une silhouette de princesse, l'ensemble deux-pièces en laine et surtout la fameuse robe de cocktail noire serrée à la taille et plus évasée vers le bas du corps, attachée aux épaules par deux jolis noeuds. Mais parmi la multitude de tenues que l’actrice inspira au couturier et qu’il réalisa pour elle, une en particulière marqua l’histoire : la petite robe noire assortie de gants et d’un collier de perles portée dans le film Diamants sur canapé. Archétype de toutes les petites robes noires à venir, la robe est réalisée dans une soie noire de très haute qualité, dévoilant juste assez les épaules et le dos pour permettre aux rangs de perles de briller comme il se doit. Accompagnée de longs gants et de lunettes noires, elle a contribué à rendre mémorable la scène où l'actrice, dans le rôle de Holly Golightly, mange un croissant devant les vitrines new-yorkaises de Tiffany's.
Les tenues élégantes de souveraines, de Jackie Kennedy à Grace de Monaco
Mais bien que l’amitié entre Audrey Hepburn et Givenchy ait été spéciale et significative bien en dehors des studios de couture, l’actrice n’est pas la seule icône à avoir arboré fièrement les pièces d’Hubert de Givenchy. Jacqueline Kennedy, Grace de Monaco ou encore la duchesse de Windsor, … la liste des souveraines et divas que le couturier a honoré de ses robes est longue. Tout le monde se souvient par exemple de la robe en satin de soie ivoire brodée de fleurs portées par Jackie Kennedy lors d’une rencontre entre le couple présidentiel américain et Charles de Gaulle à Versailles. De l’autre côté de l'Atlantique, la patte de Givenchy plait tout autant. En 1961, Grace Kelly, nouvellement princesse de Monaco, visite la Maison Blanche vêtue d’une magnifique tailleur en laine verte, sorti tout droit de la collection SS61 du créateur français. Avec son encolure droite, son noeud à la taille et son petit boléro à manches trois-quarts, l’ensemble incarne l’essence même du succès de Givenchy, adapté à la personnalité et au style de la princesse.
La blouse bettina, la robe chemise, le respect des femmes et de leur liberté
Le créateur n’aura pas mis longtemps à présenter une pièce iconique qui marqua les esprits. Dès son tout premier défilé présenté en février 1952 intitulé Les Séparables, Givenchy dévoile la blouse Bettina qui devient sans attendre une de ses créations les plus célèbres. La blouse en dentelle baptisée en l’honneur de la directrice des relations publiques de la maison Bettina Graziani est l’incarnation même de l’élégance à la Givenchy. Marquée à la taille, ornée de volants à broderie anglaise sur les manches et son col élégant, la blouse Bettina se distingue par sa capacité à se marier avec une grande variété de vêtements, qu'il s'agisse de jupes ou de pantalons. Polyvalente et contemporaine, elle accompagne les femmes dans leurs nouveaux rôles et leur quête croissante d’émancipation. Trois ans plus tard, Givenchy présente la robe chemise, autre création iconique qui changea la donne dans la mode de l’époque. Popularisée par Marie-Antoinette et sa chemise à la reine, la revisite de Givenchy de la robe chemise incarne le parfait équilibre entre féminité et praticité. A l’ère de la “femme fleur” et du New Look de Christian Dior, du retour des corsets et des silhouettes de la Belle Epoque, Givenchy, à travers la blouse Bettina et la robe chemise arrive grâce à l'ingéniosité des coupes et des formes à se démarquer et à proposer une approche à la mode différente de ses confrères, en respectant les femmes, leur corps et leur liberté.
“Givenchy Université”, une des premières lignes de prêt-à-porter de luxe
En 1960, alors que la société de consommation en plein essor - encouragée par les vecteurs de diffusion de masse comme le cinéma et la télévision - nécessite un type de production de vêtement qui puisse suivre son rythme effréné, le prêt-à-porter émerge. Jacques Heim, alors président de la Chambre syndicale de la haute couture lance le “prêt-à-porter création” afin de proposer aux consommateurs des modèles adaptés à leurs besoins et destinée à la vente en série. Quelques années plus tard, les couturiers prendront l’initiative de créer le « prêt-à-porter des couturiers » pour se distinguer du « prêt-à-porter industriel », ce dernier étant caractérisé par l’utilisation de matériaux plus abordables, de coupes simplifiées et, surtout, par un prestige moindre. L’un des premiers grands couturiers à proposer une ligne de prêt-à-porter de luxe n’est autre que - on vous le donne en mille - Hubert de Givenchy, avec sa ligne “Givenchy Université”, fabriquée à Paris à l’aide de machines à coudre venues tout droit des États-Unis. Cette branche de la Maison, aux côtés de ses collègues de l’industrie comme Elsa Schiaparelli ou encore Pierre Balmain avec sa ligne “Florilège” va fortement contribuer à rendre la mode de haut niveau plus accessible, plus présente, et plus ancrée que jamais dans les foyers français, du nord au sud.
Les parfums Givenchy
Bien que cette partie de la carrière de Givenchy n’entre pas exactement dans la catégorie “mode”, impossible de parler de la maison française sans citer ses parfums. Si encore aujourd’hui, le parfum “L’interdit” est aussi populaire, c’est grâce au précurseur de la maison. Le parfum voit le jour en 1957, créé en hommage à la muse incontestée de Givenchy que l’on ne présente plus : Audrey Hepburn. Pour la première fois, une grande marque de mode passe par une égérie pour lancer la promotion d’un parfum. À cette époque, Christian Dior (qui va d’ailleurs mourir cette année-là) règne en maître, entre sa collection New Look qui révolutionna la mode et sa filiale Parfum Christian Dior. Même le mentor de Givenchy, Cristobal Balenciaga prospère dans le monde de la parfumerie. Inspiré par ses collègues, Givenchy se lance. L’affaire démarre de manière discrète et modeste, au rez-de-chaussée d’un bâtiment à à Levallois-Perret à l’aide de quelques fonds familiaux. Ce nouveau lancement sera un succès immédiat.
En 1988, alors que son créateur est âgé de 60 ans, la maison Givenchy est vendue au groupe LVMH. Après avoir reçu de nombreuses récompenses (Dé d’or en 1978 et 1982, Chevalier de la Légion d’honneur en 1983), Hubert de Givenchy quitte la maison en 1995. Il sera immédiatement remplacé par le roi du maximalisme John Galliano, qui y restera un an, suivi de Lee Alexander McQueen, qui passera quatre année à la tête de sa direction créative, Julien MacDonald, Riccardo Tisci (qui lui y resta 12 ans), Clare Waight Keller, Matthew M Williams, et Sarah Burton, qui vient d’être nommée directrice artistique de la maison. Presque 7 ans après sa disparition et après 60 ans de carrière, Hubert de Givenchy est et rest un grand maître de la mode française, dont la mémoire restera honorée pour les générations à venir.