Que faisait H&M sur le tapis rouge du Met Gala ?

Awkwafina, Adwoa Aboah, Paloma Elsesser, Quannah Chasinghorse, Hari Nef et Stefon Diggs ont été les célébrités habillées par H&M pour le Met Gala 2024. Et si l'idée qu'H&M participe au Met Gala aux côtés des poids lourds de la mode de luxe mondiale fait lever quelques sourcils, il sera encore plus surprenant de découvrir que la méga-marque suédoise est présente sur le tapis rouge du Met Gala depuis aussi loin que 2015. Pourquoi l'avons-nous remarqué lors de cette édition? Peut-être parce que, pour la première fois, H&M n'a pas seulement habillé l'un des groupes de stars les plus importants présents, mais a également été présente aux côtés d'un autre groupe de marques habituellement non associées au luxe et à la haute couture comme Da’Vine Joy Randolph qui portait par exemple une robe sur mesure de chez Gap. Une autre donnée intéressante est que, après avoir habillé le groupe de K-Pop Stray Kids, c'est Tommy Hilfiger qui a généré le plus de conversations en ligne parmi toutes les autres marques de la soirée avec plus de 40 000 mentions sur les réseaux sociaux entre cinq heures et demie et huit heures et demie lundi dernier - dépassant Alaïa, Burberry, Loewe et Margiela avec une grande avance. Maintenant, si la présence de marques comme Topshop, Gap, H&M et Brother Wellies au Met Gala dure depuis au moins une décennie (bien que plus discrètement), cette année, l'absence de plusieurs acteurs du luxe comme Louis Vuitton, Gucci et Bottega Veneta a fait immédiatement remarquer la présence des "marques de centre commercial", c'est-à-dire des marques que l'on trouve généralement dans les centres commerciaux.

Dans le cas de H&M, la démarche découle d'une tentative de se démarquer de ses homologues du marché de masse, mise en œuvre il y a quelque temps avec le lancement de la collection Studio. Gap a également tenté de monter en gamme en recrutant un nouveau PDG, Richard Dickinson, l'été dernier, et en nommant Zac Posen vice-président et directeur de la création. Et la présence de marques de centre commercial, peut-être plus modestes que le luxe mais financièrement gigantesques, est un témoignage de la puissance commerciale de ces géants et de leur immense pénétration sur le marché mondial. Mais cette présence même indique comment le concept d'aspiration est en train de changer pour l'industrie, pas tant pour la mode elle-même, mais pour les vêtements dans un sens plus large. Alors que de nombreuses marques de luxe ont adopté un modèle de fast fashion en couvrant toutes les catégories de marché, en imposant aux magasins une rotation plus rapide des marchandises, en économisant sur les matières premières et les processus de fabrication et en simplifiant de nombreux designs pour réduire les coûts; de nombreuses marques de centre commercial ont réalisé qu'elles pouvaient produire les mêmes basiques bon marché en les rendant un peu plus élevés pour une fraction du prix, en améliorant leurs campagnes et leur e-commerce, et en se positionnant plus haut sur le marché. 

L'idée, on le suppose, est de capturer les clients aspirants à la recherche de dupes en tentant de pénétrer dans le territoire autrefois occupé par le luxe accessible avec des lignes comme H&M Premium ou COS Atelier mais aussi des marques comme Massimo Dutti. Ce qui ne concerne pas seulement le luxe : les sandales H&M, par exemple, sont une réplique des Birkenstock et coûtent la moitié moins cher ; une ceinture en cuir de style western ne coûte que 25 € ; sur TikTok, on parle beaucoup des Column Jeans de COS qui coûtent moins cher que n'importe quel Levi's. Le problème, cependant, réside dans le luxe, surtout pour des occasions comme le Met Gala : les marques indépendantes peuvent passer, mais qui opèrent toujours dans la sphère du luxe ; mais si hypothétiquement le tapis rouge du Met s'ouvrait également aux alternatives de marché les moins chères, ce sont les grands noms de la couture qui fuiraient – l'exclusivité est tout dans ce monde. Mais il est difficile que cela se produise : après tout, ces marques participent au Met Gala depuis une décennie et c'est toujours le luxe qui a le dernier mot. La présence d'H&M au Met Gala, cependant, ainsi que la présence de Hunter Schafer et Iris Law à l'inauguration du nouveau méga magasin à Soho à New York, les collaborations avec Mugler et Rokh lancées avec des soirées pleines de stars et de musique d'Arca signalent aux clients actuels et potentiels qu'il n'y a aucun problème à acheter quelque chose chez H&M, que la marque n'est pas déplacée à côté d'autres vêtements signés dans la même tenue et, en général, que sur le plan du marketing, la boutique et le centre commercial parlent le même langage. Cela peut sembler paradoxal, mais ils se retrouvent sûrement ensemble sur le même tapis rouge.