
Hollywood est également victime des tarifs douaniers de Trump
La plus grande industrie cinématographique du monde pourrait perdre l'un de ses plus grands marchés
11 Avril 2025
Hollywood ne traverse toujours pas une bonne passe et cette fois, le coupable est Donald Trump lui-même. Après l’annonce de l’aggravation des droits de douane imposés par le gouvernement américain à l’encontre de la Chine (atteignant actuellement 145 %), le gouvernement chinois a décidé de répondre par des mesures de protectionnisme culturel envers les États-Unis. Comme le rapporte The Guardian, jeudi dernier, l’Administration cinématographique chinoise a décidé de ralentir l’importation de films américains dans le pays, soulignant que « les mauvaises actions du gouvernement américain abusant des droits de douane contre la Chine réduiront inévitablement l’intérêt du public national pour les films américains ». Si l’industrie cinématographique américaine perdait le public chinois, l’impact sur les recettes au box-office serait immédiat, surtout si l’on considère que de nombreux succès récents au box-office (y compris celui de Minecraft) ont largement bénéficié de ce marché. Les dernières mesures tarifaires imposées par l’administration Trump ont également eu un effet négatif sur les actions des grandes maisons de distribution américaines (comme Paramount, Walt Disney Co et Warner Bros). Pourtant, la réaction de Trump à la nouvelle a été loin d’être inquiète : le Président a en effet commenté la décision de Pékin par un simple « je pense avoir vu pire », défiant presque ouvertement le Gouvernement central chinois.
De plus, la situation d’Hollywood en Chine était déjà depuis longtemps précaire. Le marché chinois — autrefois considéré comme crucial pour compenser d’éventuelles baisses de recettes en Occident — s’oriente progressivement vers des productions locales capables de surpasser largement les titres américains. Un exemple frappant est le récent succès de Ne Zha 2, qui a éclipsé Vice-versa 2 de Pixar, devenant ainsi le film d’animation ayant réalisé le plus gros chiffre d’affaires de tous les temps en Chine. L’auteur Chris Fenton a souligné à Reuters que limiter les films américains est une stratégie de représailles très visible et à très faible risque pour la Chine, surtout si l’on considère qu’à ce jour, les films hollywoodiens ne représentent que 5 % des recettes totales du box-office chinois et, en plus, les studios ne reçoivent que 25 % des revenus générés par la vente des billets (soit environ la moitié par rapport à d’autres marchés internationaux). Il convient également de rappeler que, même avant cette nouvelle décision de Pékin, le nombre de films hollywoodiens approuvés pour l’importation en Chine était limité à une dizaine par an (souvent des blockbusters jugés incontournables), signe que l’influence culturelle américaine dans le pays avait déjà diminué avec le temps. De même, les grandes plateformes de streaming occidentales, comme Netflix, Amazon Prime et Disney+, n’ont pas accès au marché chinois, tandis que la consommation en ligne est assurée par des services locaux comme iQIYI.
'Ne Zha 2' crosses $2B at the worldwide box office
— Culture Crave (@CultureCrave) March 4, 2025
• First non-Hollywood film to do this
• 98% of the box office came from China
• Took 33 days pic.twitter.com/iZOhxagSGk
Il est certain que la récente restriction sur les films américains représente une contre-attaque tarifaire, mais elle s’inscrit aussi dans un contexte de protectionnisme culturel déjà enraciné : de la promotion du soi-disant New Chinese Style dans la mode – une réinterprétation contemporaine des vêtements traditionnels – aux limitations imposées à divers produits de divertissement étrangers. Comme le rapporte Deadline, rien que ce mois-ci, les autorités chinoises ont donné des signes de vouloir assouplir (et non arrêter totalement) l’interdiction en vigueur depuis 2017 pénalisant la diffusion de K-pop, de K-dramas et d’autres contenus sud-coréens, une industrie considérée comme équivalente à Hollywood en Asie. Il reste à voir si l’assouplissement supposé sur les produits coréens entraînera un retour en arrière similaire pour le cinéma hollywoodien, ou si la Chine et les États-Unis resteront enlacés dans une confrontation qui, au-delà des droits de douane, semble refléter un affrontement plus large pour la suprématie culturelle. Et dans un paysage où chaque décision politique se répercute inévitablement sur les goûts du public, le défi pour Hollywood n’est pas seulement économique, mais aussi symbolique.