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La France est-elle en train de devenir le nouveau Hollywood ?

De nombreuses productions investissent dans la région et obtiennent les prix les plus prestigieux

La France est-elle en train de devenir le nouveau Hollywood ? De nombreuses productions investissent dans la région et obtiennent les prix les plus prestigieux

La France et son cinéma sont un grand investissement – non seulement pour le territoire, mais aussi pour une industrie qui continue de démontrer sa pertinence internationale, tant d’un point de vue critique que strictement productif. Les films français continuent de se positionner en tête des festivals mondiaux majeurs (de Titane à Anatomie d’une chute, tous deux Palmes d’Or à Cannes en 2021 et 2023) et de se hisser aux premières places des classements culturels, comme L’homme dans les bois d’Alain Guiraudie, qui figure en tête de la liste des meilleurs films de 2024 des Cahiers du Cinéma, ou encore La Bête de Bertrand Bonello, enrichissant le discours autour des analyses modernes du cinéma sous un angle théorique. Qu’il s’agisse d’œuvres remettant en question les normes sociales, comme La Passagère d’Héloïse Pelloquet avec Cécile De France et Un été encore de Catherine Breillat – présentant des femmes adultes en relations avec des hommes (beaucoup) plus jeunes – ou explorant la masculinité problématique, comme dans deux titres de la 81ᵉ Mostra de Venise : Jouer avec le feu de Delphine et Muriel Coulin et Leurs enfants après eux de Ludovic et Zoran Boukherma, la France reste un terreau fertile pour un cinéma de tout type. Même Hollywood semble l’avoir remarqué.

En réalité, s’il faut parler de reflet “hollywoodien”, il faudrait plutôt l’entendre en termes de notoriété et de réception que certains titres phares reçoivent. The Substance et Emilia Pérez, tous deux réalisés par des cinéastes français et tournés en Europe, figurent parmi les films les plus attendus pour la saison des récompenses 2024. Coralie Fargeat, débutant dans le long métrage avec Revenge et en pleine ascension avec un body horror mettant en vedette Demi Moore et Margaret Qualley, a situé l’histoire d’une ancienne animatrice d’émission de fitness qui choisit de “se transformer” en une version améliorée d’elle-même dans un Los Angeles atypique. Le souhait de l’autrice était de proposer une vision alternative à la ville habituellement lisse et arriviste, en confiant la construction des décors aux studios Epinay de TSF près de Paris et en choisissant la Côte d’Azur pour les scènes en extérieur. Jacques Audiard, quant à lui, s’est entouré de son équipe habituelle pour son gangster musical avec Zoe Saldaña, Karla Sofía Gascón et Selena Gomez. Bien que l’intrigue se déroule au Mexique, le réalisateur a choisi de tourner intégralement dans les studios français de Bry-sur-Marne.

Deux exemples qui démontrent l’attractivité que la France exerce sur les productions locales et internationales, grâce principalement à ses décors et à ses professionnels qualifiés. Si l’on devait évaluer l’offre uniquement en termes d’incitations fiscales, elle ne serait pas aussi compétitive que des capitales comme Londres ou Prague. La France offre 30 % de crédit d’impôt sur les dépenses réalisées sur son territoire, pouvant aller jusqu’à 40 % si les effets visuels sont réalisés localement et dépassent les 2 millions d’euros – soit 2,18 millions de dollars. Laurent Kleindienst, vice-président des stratégies et du développement des studios TSF à Paris, a évoqué les avantages économiques et créatifs du tournage en France lors d’un panel à l’American French Film Festival à Los Angeles en novembre 2024, où il a indiqué qu’environ 50 plateaux de tournage sont actuellement en construction dans le pays, dont 12 dans un complexe de 120 acres.

Un backlot de cinq acres a récemment été inauguré, idéal pour recréer divers décors et reproduire des rues parisiennes. Selon Variety, cela représente un investissement de 15 millions de dollars sur les 110 millions alloués au plan France 2030, destiné à renforcer les infrastructures de production. « Tout comme à Los Angeles, il est devenu de plus en plus difficile de tourner dans les grandes capitales », a expliqué Kleindienst. « Ainsi, les backlots sont devenus essentiels pour contrôler un environnement tout en offrant une grande liberté de tournage. » Une production également durable. Kleindienst a indiqué que leurs studios recycleraient 98 % des 10 à 15 tonnes de déchets qu’ils produisent.

Une offre avantageuse pour les budgets et respectueuse de la planète, qui peut parfois répondre non seulement à des besoins économiques, mais aussi narratifs et immersifs. C’est le cas de la série prévue pour 2025 Le Comte de Monte-Cristo, une adaptation de l’œuvre d’Alexandre Dumas, produite avec un budget d’environ 50 millions de dollars, soit un tiers de ce que coûterait un blockbuster américain de même envergure. Lors du même panel, le producteur Dimitri Rassam, également à l’origine du diptyque français Les Trois Mousquetaires, a déclaré : « Nous avons créé un projet à une fraction du coût que cela aurait représenté ailleurs. Nous avons pris cette décision non pas parce que c’était moins cher (le coût n’a pas déterminé le lieu de tournage, car cela aurait été moins cher de tourner ailleurs en Europe de l’Est, ndlr), mais parce que c’était nécessaire pour le bien de l’œuvre. Nous avions besoin que les acteurs se sentent le plus proche possible de l’histoire. » La série Le Comte de Monte-Cristo est également une coproduction italienne – comme le récent Le Déluge - Les derniers jours de Marie-Antoinette – impliquant Rai Fiction et Palomar, tournée en France pendant 70 jours, avec des scènes supplémentaires réalisées à Malte et en Belgique dans les studios Lites, considérés comme le studio aquatique intérieur le plus avancé au monde.