Histoire du top 50, quand trois rockeurs Français ont bousculé les charts
Retour sur l’incroyable impact du Top 50, entre hits et polémiques
06 Novembre 2024
Il y a 40 ans, arrivait sur nos petits écrans non seulement une chaîne de télévision qui aura un impact sur la France, ses news, et sa culture pop, mais également un concept qui changera le monde de la musique en France et ailleurs, ainsi que la façon dont elle sera perçue et consommée. Avec la naissance de la chaîne Canal+, naissait également le top 50, le classement des 50 titres les plus écoutés de la semaine, créé par des amateurs de rock désireux de changer à leur échelle le showbiz. Ces amateurs de rock en question sont au nombre de trois, et se prénomment Pierre Lescure, Alain de Greef et Philippe Gildas. A cette époque, les deux premiers travaillent depuis un petit moment sur la création d’une chaîne cryptée, tandis que le 3eme, alors à la tête d’Europe 1, a pour projet de ramener en France le concept des billboards américains. Voici donc l’histoire du top 50, un projet qui semblait pourtant bien parti, mais qui ne s’est pas déroulé exactement comme prévu.
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Le concept était relativement simple: chaque semaine, les instituts Nielsen et Ipsos réalisent leur enquête auprès d’un panel de disquaires répartis à travers la France et constituent le classement. Chaque lundi, les compteurs sont réinitialisés. En plus de ça, la chaîne s’impose 2 objectifs : diffuser en priorité les nouvelles entrées du classement et programmer au moins douze titres inédits chaque semaine. Une fois le projet entièrement développé et élaboré, il ne restait plus qu’à trouver la personne parfaite qui présenterait le programme top 50 et les chansons qui en font partie au public de la chaîne. Le nom de Marc Toesca, alors déjà employé de Canal+, s’impose comme une évidence pour les trois fondateurs du concept. Mais encore fallait-il que ce dernier accepte ce rôle qui, de prime abord, ne l’emballait pas tellement. « J’étais clairement réfractaire à ce principe de hit-parade, se souvient-il. Finalement, Pierre Lescure m’a présenté le projet comme quelque chose d’assez punk. À l’époque, chaque radio avait son hit-parade, souvent créé en fonction d’accords assez flous avec les différentes maisons de disques. Pour la première fois, un classement permettait donc de savoir qui vend réellement des disques en France, et dans quelles proportions !». Une fois la proposition acceptée, le tour était joué, et le programme lancé.
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Sauf que comme tout projet qui se respecte, les critiques ne manquèrent pas de pointer le bout de leur nez dès les premiers instants de son lancement. Le public accusa la production de fournir des résultats truqués, bien que les classements reposaient uniquement sur les ventes dans les hypermarchés, dans un échantillon de petites boutiques sélectionnées aléatoirement, ainsi que sur la programmation des radios FM et des radios pirates. Un autre problème rencontré par ses créateurs, et sûrement celui le plus dérangeant pour ces amoureux du rock, est qu’ils n’ont au final pas tellement eu leur mot à dire sur l’exécution du programme. Eux qui rêvaient d’une émission à travers laquelle ils pourraient exprimer et partager leur passion pour les musiques alternatives se sont au final retrouvés à diffuser des titres bien loin de leurs idéaux de rockeurs purs et durs, comme « Besoin de rien envie de toi » de Peter et Sloane, qui resta d’ailleurs au top du classement pour 9 semaines consécutives. Avec les années, malgré les nouveautés, les changements, les titres qui se succèdent, les formats qui évoluent et probablement à cause des différentes sources pour écouter de la musique qui apparaissent comme des marguerites, le programme a fini par lasser son audimat, mais aussi son présentateur.
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Depuis, les classements ont perdu en popularité, remplacés par les statistiques des plateformes de streaming, sur lesquelles plus aucun titre ne reste en tête du Top 50 pendant plus de onze semaines. Pourtant à l’heure des Spotify wrapped personnalisés et des reviews numérisées des titres les plus écoutés accessibles en un clic, le top 50 reste toutefois une légende de l’histoire de la musique. Si nos parents ont vécu une adolescence bercée par les chansons de Jean-Jacques Goldman, Dalida, ou Johnny Halliday, rois des classements qui passaient inlassablement à la radio et à la télévision, notre génération, bien qu’elle baigne dans un monde où la musique est contrôlée, scrupuleusement choisie, et digitalisée, garde toutefois une empreinte de ces années top 50. N’importe quel titre de Jul ou de Aya Nakamura passé en soirée ne vaudra jamais un cri collectif et une séance de chant à s’époumoner quand passent « Les démons de minuit » ou « Désanchantée ».