Le Breakdance fait ses premiers pas aux Jeux Olympiques
Le parcours du breakdance, du Bronx aux podiums des Jeux olympiques de Paris 2024
08 Août 2024
Commençons par poser le contexte. Nous sommes dans les années 70 à New York, la ville est en crise économique car bon nombre de ses résidents ont décidé de la quitter pour élire domicile en banlieue, laissant ainsi derrière eux le chaos et la confusion de ses rues bruyantes et polluées. Aux antipodes de Manhattan et de Times Square, le quartier qui nous intéresse, cependant, c’est le Bronx (le Sud du Bronx plus particulièrement). Un quartier peuplé d’habitants d’origine Afro-américaine ou Portoricaines où la misère règne en maître, incitant ses résidents à commettre des actes regrettables juste pour leur permettre de se maintenir en vie. Et pourtant, c’est bien dans ces rues recouvertes de graffitis où on y penserait à deux fois avant d’y faire un tour une fois le soleil couché, que naquit un des piliers de la danse : le Breakdance. La pratique a fait bien du chemin depuis sa naissance, car pour la toute première fois, le break-dance, ou plutôt le breaking, entrera dans la liste des disciplines pour lesquelles les sportifs se disputeront la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Paris 2024. Bien que ce style de danse ait déjà été introduit lors des Jeux Olympiques de la jeunesse de 2018 à Buenos Aires, elle fera sa première apparition dans une édition des Jeux Olympiques officiels, tout comme l’escalade, le surf et le skateboard.
Mais revenons-en à notre histoire et voyons comment le breakdance a fait pour passer des immeubles abandonnés et terrains vagues du Bronx aux podiums des JO. Au-delà d’être connu du plan grand nombre pour sa réputation de gangster au sang froid, le quartier Bronx commençait également à se faire connaître pour sa musique. Berceau de nombreux styles musicaux, comme le disco, la salsa, le funk, ou encore le mambo, le tout New-York s’y réunissait pour y faire la fête jusqu’au petit matin. C’est donc dans cette atmosphère festive que le hip-hop vit le jour. On dit que le papa du breakdance serait DJ Cool Herk, qui aurait ramené des influences de sa terre natale, la Jamaïque, sur le sol américain. C’est donc lors des «Jams» (aussi appelée «party house» ou «block party») organisées par ce dernier, qui prenaient place aussi bien dans un coin de rue que dans un immeuble à l’abandon, que les premiers B-boys et B-girls firent leur apparition. Le terme «breakdance» fait référence non seulement au fait que, en dansant, les corps des b-boys se cassent, se réparent, tombent au sol, se relèvent, et ainsi de suite, mais ainsi au «break» (la coupure, interlude d’un morceau interrompant ainsi son flux rythmique) du vinyle que le DJ utilisait et faisait tourner en boucle pour faire s’enflammer la piste de danse. Une répétition continue qui rendait les danseurs fous, au point de leur faire atteindre un point de non-retour (point-break). La pratique du breakdance consiste donc à effectuer des figures acrobatiques en l’air et sur le sol au rythme d’un son hip-hop en défiant les lois de la gravité.
À partir des années 80, le mouvement (car il ne s’agit pas là seulement d’un style de danse mais bien d’une vague toute entière) s'envolera au-delà des frontières du Bronx et même du continent américain pour se populariser dans le monde entier. Toujours aux alentours de cette période, de nombreux films portant sur le sujet entreront dans les annales du cinéma et participeront à cette popularisation de masse, tels que Breakin', ou encore Battle of the Year avec en star principale Chris Brown. Les années 2000 quant-à-elles, accentuèrent la tendance, voyant naître toujours plus de séries et sagas autour de la danse. Impossible de ne pas mentionner Channing Tatum dans la franchise Step Up, qui donna envie aux spectateurs, même ceux n'ayant pas reçu le don du rythme à la naissance, de se mettre au sol et de tenter le headspin.
En plus de leur coolness et nonchalance légendaire , il est clair que les tenues des adeptes du breaking jouent un rôle clé dans le charme qu'ils dégagent. Casquette survet' : tels sont les maîtres mots de la philosophie vestimentaires des danseurs, qui de maîtres, en réalité, n'en ont pas. À ses débuts dans les années 70, le style honorait une palette de couleurs rendant hommage à la Jamaïque (soit le noir, le rouge, le vert et le jaune). L'Afrique se porte autour du cou, les accessoires se multiplient, les lobes s'alourdissent de boucle d'oreille en diamants et le mot «minimalisme» est introuvable dans le vocabulaire des danseurs. Au début des années 80, le duo Kriss Kross se fait remarquer non seulement pour son talent musical, mais aussi pour ses outfits XXL. Naquit ainsi la tendance du «sagging» (manière de porter son pantalon en dessous de la taille de sorte à laisser apparaître de manière significative une partie ou l'intégralité de ses sous-vêtements). Un pantalon extra-large, un sweat à capuche, un tee-shirt ample et une grosse chaine, tels sont les éléments qui constituent le nouvel uniforme des adeptes du breakdance.
Un uniforme qui, aujourd'hui, conquit une belle partie des plus grands noms de la mode. En effet, la tendance à réussit à convaincre un public qui de base était loin d'être sa cible, et foule désormais les podiums des Fashion Week. Balenciaga, avec Demna à sa tête depuis presque une décennie, propose collection après collection des pièces plus larges les unes que les autres, donnant à ses clients l'occasion de respecter les codes du streetwear des pieds à la tête. Gucci, quant-à-lui, a également maintes et maintes fois proposé des pièces également aux allures street (notamment lors de sa collection FW22), comme par exemple sa GG jacket. La Maison a notamment plusieurs fois mélangé son génie à celui de marques de streetwear comme Adidas, Patta ou encore The North face. Plus récemment, le rappeur A$AP Rocky a fait ses débuts dans la mode en présentant sa marque AWGE, constituée à 90% de t-shirts oversizes et de pantalons baggy. Une première collection qui annonce déjà une marque à l'ADN ancré dans la culture de la rue et du hip hop. Cette culture, on la retrouvera le 9 et 10 août prochain, lorsque les 16 B-Boys et B-girls se disputeront la médaille d'or de breaking sur les planches qui feront office de piste de danse Place de la Concorde. C'est là que les candidats s’affronteront lors de battles sans merci, en one to one, improvisant une chorégraphie aux rythmes du DJ qui animera l’évènement. De quoi nous faire tourner la tête comme tourneront celles des danseurs quand ils exécuteront leurs spin down d'ici quelques jours.