Le déclin du règne des parents influenceurs
Que dit la nouvelle loi sur le droit à l’image des enfants
08 Février 2024
L'Assemblée nationale a marqué une avancée significative dans la protection du droit à l'image des enfants ce mardi 6 février 2024. Les députés ont unanimement adopté une loi visant à renforcer les mesures de protection, particulièrement contre les abus de parents exposant excessivement leurs enfants sur les réseaux sociaux. Si ça n'a pas été écrit noir sur blanc, on ne peut s'empêcher de penser que cette loi a été pensée pour encadrer les dérives des influenceurs. Si vous n’en suivez pas, vous devez tout de même pouvoir citer quelques noms de parents-influenceurs, que ce soit des personnages de téléréalité ou des créateurs de contenus. Comme vous et moi, ils utilisent leurs plateformes pour partager des moments de leur vie, mais une grande partie de leur contenu est scénarisée. Des après-midi pâtisseries aux rentrées scolaires en passant par des "get ready with us", tout y passe. Si les célébrités ont tendance à préserver la vie privée de leurs enfants jusqu'à l'adolescence et puis comme par magie des nepo-babies par centaines font subitement leur apparition sur la scène publique. En contraste, les parents influenceurs capitalisent sur le dos de leurs enfants dès les premiers instants. Selon une étude 1,1 % des parents français d’enfants de moins de 16 ans sont influenceurs aujourd’hui et tirent un avantage de ces publications. À la différence de la loi régulant les activités des influenceurs, celle-ci ne se contente pas d'interdire la promotion de certains produits ; elle vise principalement à garantir le respect de la vie privée des mineurs.
Une nouvelle loi régissant les parents influenceurs
L'attention accrue portée aux risques liés à la surexposition des enfants sur les plateformes numériques a déclenché des débats cruciaux sur la protection des plus jeunes dans l'environnement virtuel. Les rouages de la nouvelle loi s'articulent autour de mesures concrètes visant à limiter la prolifération de contenus mettant en scène des mineurs sur les plateformes numériques, prenant en compte les risques potentiels pour leur bien-être psychologique. Ce droit est lié à la vie privée de l’enfant, et bien que les parents aient le contrôle tant qu’il n’a pas la majorité, c'est à eux de s'assurer de son respect. Ils doivent obtenir une autorisation écrite avant de partager l'image de leur enfant, même dans des situations comme les publications internes à l'école. S’ils sont séparés et ont tous deux l'autorité parentale, les deux doivent être d'accord pour partager des images de l'enfant. En cas de violation de ce droit, des dommages-intérêts peuvent être attribués à l'enfant, représenté par ses géniteurs, ou éventuellement à eux-mêmes. Avec une croissance exponentielle d'abonnés, les familles d’influenceurs partagent ouvertement leur expérience et deviennent en quelque sorte des doctolib de la parentalité. En exposant leur quotidien de manière naturelle, les parents créent un lien de proximité avec leur communauté qu’ils conseillent et qui peut s’identifier à eux. Soyons honnêtes, c’est aussi une source de revenus conséquents, 47 % des parents-influenceurs déclarent que cette activité est devenue leur seule source de revenu, notamment via les partenariats conclus avec des marques. Pour ces familles 2.0, la loi impose des règles spécifiques en ce qui concerne la publication d'images de leurs enfants sur les réseaux sociaux. Lorsque l'activité de ce dernier est considérée comme relevant d'une relation de travail et qu'il a moins de 16 ans, les parents doivent obtenir une autorisation préalable de l'inspection du travail avant de publier des vidéos où il est le sujet principal.
L’impact de la loi sur le futur des enfants
Adoption de la loi sur le droit à l'image des enfants
— Sarah Tanzilli (@sarah_tanzilli) February 6, 2024
Sensibilisons les parents pour qu'ils puissent protéger la vie privée de leurs enfants
50 % des photos sur les sites pédocriminels auraient initialement été publiées par les parents sur leurs réseaux en tte bonne foi pic.twitter.com/QF5pFOSINK
Cette loi s’inscrit comme un tournant marquant dans la protection de l’enfance, compte tenu des risques liés à l’exposition des enfants sur les plateformes. En effet, même si les tout-petits ne peuvent pas exprimer leur avis, il arrive parfois qu'ils regrettent cette surexposition en grandissant. Selon une étude de Microsoft publiée en 2019, quatre adolescents sur dix estiment que leurs parents les ont trop exposés sur les réseaux sociaux. De plus, plus de la moitié des parents-influenceurs admettent ne pas avoir obtenu le consentement de leurs enfants avant de publier des moments intimes, tandis que près de 60 % estiment qu'une heure de préparation est nécessaire pour chaque contenu. Ces pratiques sont régulièrement dénoncées par certaines associations de protection de l'enfance, qualifiant cela de travail caché, voire de travail forcé. Un aspect particulièrement alarmant de ce phénomène a notamment été souligné par un rapport du National Center for Missing and Exploited Children en 2020. Il indique que 50 % des photos échangées sur les forums pédopornographiques ont été initialement publiées par les parents sur leurs réseaux sociaux. Bien évidemment, nous ne voulons pas dissuader quiconque aspire à cette carrière, toutefois ce n’est pas un sujet à prendre à la légère.