Grève á Hollywood et comment le cinéma Italien en profite

La Mostra de Venise a toujours accueilli des films italiens, mais jamais plus de trois. Cette année, les écrans de la lagune ont accueilli pas moins de six productions italiennes, le nombre le plus élevé de ces 25 dernières années, et une sélection qui a compté des films particulièrement ambitieux, dont les budgets ont dépassé les 7 millions d'euros - un chiffre qui, il y a encore une dizaine d'années, était considéré comme très élevé pour les productions italiennes. Les films italiens ont beaucoup changé depuis la pandémie et aujourd'hui, pour rattraper leur retard, ils cherchent à attirer un nouveau type de spectateurs. Avec l'augmentation des subventions publiques au cinéma, les productions italiennes sont devenues de plus en plus importantes et, aujourd'hui, nombre d'entre elles sont conçues pour toucher un public plus large et travailler à l'étranger. C'est dans cette optique que des films aux genres historiquement moins fréquents dans le cinéma Italien ont été produits, couvrant les récits de guerre, ainsi que le fantastique et le policier, tout en maintenant des standards techniques élevés - sur la vague de succès comme Gomorrhe, très apprécié à l'étranger.

Pourquoi Hollywood est-il en grève ?

À cette période favorable pour le cinéma italien s'ajoutent des attentes plus élevées au niveau du box-office, favorisées par une moindre concurrence dans les salles de la part des grands films américains. En effet, dans les prochains mois, peu de films américains verront le jour en raison de la grève des scénaristes hollywoodiens, à laquelle s’est ajoutée celle des acteurs il y a un peu plus d’un mois. L'agitation actuelle est due au fait que les syndicats et l'association représentant les grands  studios ne parviennent pas à se mettre d'accord sur deux questions considérées comme très importantes dans le secteur : la première concerne les paiements et de meilleures conditions, notamment en ce qui concerne les « residuals » c'est-à-dire les redevances de droits d'auteur pour la réutilisation des œuvres - qui ont beaucoup changé avec la diffusion des plateformes de streaming ; la seconde concerne la réglementation de l'utilisation de l'intelligence artificielle dans l'industrie. Parmi les effets de cette agitation on constate précisément une réduction du nombre de films et de séries produits en Amérique et diffusés à l’échelle mondiale. 

La revanche des films italiens à Venise  

La Mostra de Venise constitue le premier grand événement international de l'industrie cinématographique à se dérouler depuis le début des grèves des acteurs et des scénaristes. Compte tenu de leur impact sur la distribution des films américains, et du fait que de nombreux films italiens ambitieux sont en compétition, la kermesse vénitienne pourrait être le signe avant-coureur d'une saison favorable pour le cinéma italien. Cela laisserait davantage de place pour la promotion et la diffusion en salle des films italiens, leur offrant ainsi plus d'opportunités de rentabilité – surtout s’ils sont aussi ambitieux que ceux présentés à Venise. De plus, les effets des grèves (qui ne semblent pas près de se terminer) seront ressentis au moins jusqu'à la fin de 2024 - même au cours de l'année prochaine, nous assisterons donc à une réduction du nombre de films et de séries télévisées américains, et pendant cette période, le cinéma italien pourrait essayer de s'imposer davantage.

Les films américains qui ont reporté la date de sortie

La distribution des films italiens, que ce soit en Italie ou à l’étranger, peine à rivaliser avec celle des films américains, dont les budgets sont beaucoup plus élevés et qui peuvent exploiter des acteurs et actrices de renommée mondiale. En raison des grèves, qui ont entraîné des retards tout au long de la chaîne, les studios ont déjà avancé la date de sortie de films de grande importance médiatique, tels que Dune 2, avec Timothée Chalamet, Godzilla x Kong : The New Empire et Le Seigneur des Anneaux : La Guerre de Rohirrim (un spin-off du Seigneur des Anneaux). Challengers, le film de Luca Guadagnino avec Zendaya qui devait faire l'ouverture de la Mostra de Venise, s'est également retrouvé dans cette spirale : à sa place, un film italien, Comandante d'Edoardo De Angelis, avec Pierfrancesco Favino dans le rôle d'un commandant de sous-marin pendant la Seconde Guerre mondiale. Même si les deux films jouent évidemment dans des ligues différentes, il s'agit d'une coïncidence qui, d'une certaine manière, démontre l'espace que le cinéma italien est en train de prendre et continuera à prendre dans les mois à venir.