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Gabrielle Chanel, la Chine, et les Coromandels

Une histoire en trois temps

Gabrielle Chanel, la Chine, et les Coromandels Une histoire en trois temps

Gabrielle Chanel s’est éteinte au Ritz de Paris en 1971, avant de pouvoir mettre un pied à Hangzhou, et probablement en Chine de manière générale. Pourtant il semblerait qu’à travers l’histoire, la maison Chanel et l’Empire du milieu restent intimement liés, comme si un joli fil de soi était cousu de la Rue Cambon aux rives du lac de l’Ouest. Un lien qui était d’ailleurs au cœur de la dernière collection Métiers d’Art de Chanel, présentée à Hangzhou début décembre, dont la muse principale était les coromandels, les mythiques paravents chinois que Gabriel Chanel collectionnait et chérissait. La légende raconte que Gabrielle Chanel avait en sa possession pas moins de 32 de ces paravents délicats, dont la réalisation reste un secret bien gardé. 

En effet, les paravents de Coromandel sont un élément historique de la culture chinoise, dont les étapes de la création ne peuvent être dévoilées. Elles seront transmises si et seulement si cela se fait de vive voix, en recouvrant les paravents d’une couche de laque qui doit être suffisamment épaisse pour pouvoir être gravée sans que le bois ne soit touché. La passion de Gabrielle Chanel pour ces paravents se développe à sa majorité, lorsqu’elle aperçoit chez un marchant un coromandel qui aurait suscité en elle une telle émotion qu’elle s’en serait « évanouie de bonheur ». Cet intérêt croissant pour l’objet ancien va s’intensifier aux côtés de son compagnon Arthur Boy Capel, qui introduira dans sa culture des textes sacrés, mythologiques, ésothériques remplissant sa bibliothèques d’ouvrages comme Œuvres d'art du Japon et de la Chine, écrit par Hayashi Tadamasa, l’un des marchands d’art japonais du XIXe siècle les plus reconnus. De sa collection d’une trentaine de paravents, 8 se trouvent au deuxième étage du 31 rue Cambon, dans l’appartement de la couturière. L’un d’entre eux, mesurant pas moins de 2,76 mètres de hauteur et 5 mètres de largeur, représente le lac de Hangzhou, avec ses montagnes, son village en fond et ses bateaux qui y flottent paisiblement.

La légende raconte que le lac serait né d’une perle taillée dans la jade par un dragon et un phoenix tombés des cieux, et représente aujourd’hui un lieu de sagesse prisé réservé seulement aux plus chanceux. Mais pour Chanel, en plus de constituer un petit bout de son histoire, il constitue également un point de vente intéressant à bien des niveaux. La collection Métiers d’Art présentée le 3 décembre dernier était la seconde à s’envoler jusqu’en Chine pour se dévoiler au monde comme il se doit. La première  remonte à 2009, alors que Karl Lagerfeld était encore à la tête de Chanel et de ses défilés légendaires. Le choix du lieu n’est pas le seul à avoir fait un clin d'œil à l’amour de Chanel pour la Chine et ses coromandels. Entre les motifs floraux typiques des paravents, les couleurs utilisées comme le vert jade, le rose et le bleu ciel évoquant l’éclat de leur laque ou encore le noir et les tons plus sombres se référant au bois de ses panneaux, le défilé tout entier était une ôde à Gabrielle Chanel et ses tant aimés Coromandels.