La Maison Margiela fait peau neuve, sans cruauté mais toujours avec style
La mode éthique n’a jamais été aussi chic
12 Novembre 2024
Si autrefois les abondants manteaux en fourrure et écharpes en peau de n’importe quel animal de la forêt peluché étaient un symbole de pouvoir, de richesse et de bon goût, on peut dire aujourd’hui que la tendance s’est inversée. Bien que les tenues hivernales décorées d’un énorme manteau en fourrure abondent sur nos feed pinterest, il s'agit pour la plupart de fausses fourrures, ou du moins de vestes vintages à qui l’acheteur donne une deuxième vie. Une pièce en fourrure neuve (en plus d'être pratiquement impayable pour le commun des mortels) pourrait attirer les foudres des fashion même les plus aguerris, mais surtout des organisations contre la maltraitance animale qui n'ont pas peur aujourd'hui de s'infiltrer dans les défilés pour dénoncer des pratiques cruelles et se faire entendre. Ce retournement de situation, la Maison Margiela l’a bien compris, car il semblerait qu'elle ait décidé d'appliquer progressivement des politiques toujours plus éthiques. S’il y a six ans la maison abolissait l’utilisation de fourrure, cette année, elle pousse la tendance un peu plus loin en décidant de ne plus utiliser de laine angora dans ses collections, respectant la demande de l’association PETA.
C’est d’ailleurs l'association elle-même qui a annoncé ce changement : « PETA célèbre l’engagement de Maison Margiela à étendre sa politique sans fourrure pour inclure l’angora et rappelle que les modeurs et modeuses d’aujourd’hui ne veulent pas de produits d’une industrie où l’on arrache par poignée les poils de lapins pleinement conscients, terrifiés et en proie à une agonie sans pareille », a déclaré James Fraser, chargé des relations d’entreprise pour PETA France. Changement authentique ou manière pour la marque de dorer son image ? Difficile à dire, car si la Maison se présente depuis ses débuts comme une marque allant à l’encontre de la mode, de ses codes et de ses pratiques parfois moralement discutables, il semblerait qu’aujourd’hui elle ne soit toutefois pas aussi éthique et durable que l’on ne le pense.
Quand Martin Margiela lança sa marque éponyme en 1988, ce n’était pas pour créer des vêtements qui ressemblent aux autres dans des tissus traditionnels. La Maison a fait ses débuts à base de vieux gants et chaussettes cousues en des vestes, le tout maintenu ensemble par du ruban adhésif et décoré de colliers en bouchon de champagnes ou en assiettes cassées. En 1990, son créateur lançait une ligne de vêtements « artisanaux » entièrement fabriqués à partir de tissus recyclés provenant de magasins de seconde main, notamment des robes portées par les dames pour boire le thé dans les années 1940, recyclées et réutilisées pour créer des silhouettes amples et longilignes. L'objectif de Margiela était de prendre les déchets du monde de la mode et de les réinventer, de manière délibérée et évidente, pour en faire une déclaration puissante sur les déchets, la consommation de masse et la magie de la réinvention, prenant au pied de la lettre le dicton anglais « les déchets des uns font les trésors des autres ».
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Pourtant en 2022, une analyse du niveau d'éthicité de la Maison révélait que les choses auraient bien changé pour la marque. Selon l’analyse, la marque utiliserait peu de matériaux respectueux de l'environnement et rien n'indiquerait qu'elle minimise les déchets textiles, qu'elle réduise ses émissions de carbone et autres gaz à effet de serre dans sa chaîne d'approvisionnement, ou qu'elle ait pris des mesures significatives pour réduire ou éliminer les produits chimiques dangereux. En ce qui concerne l’utilisation de matière animale, la maison n'afficherait pas de politique officielle. Si la Maison Margiela n'utilisait alors pas de fourrure ni de peau d'animaux exotiques, elle avait pourtant recours au cuir, à la laine, à l'angora (à l'époque), au duvet et aux poils d'animaux exotiques. L’annonce de ce changement au niveau des matières utilisées et la suppression de la laine angora de ses collections annonce donc que malgré ces critiques, la marque est prête à revoir ses habitudes de production et encline à faire quelques sacrifices. La maison rejoint ainsi une centaine d’autres grandes marques - dont Armani, Valentino, Gucci, Diane von Furstenberg, Calvin Klein, Burberry, Farfetch, Tommy Hilfiger ou encore Stella McCartney - particulièrement engagées dans la lutte pour le bien être animal et l’utilisation de matières vegan.