Les marques de mode durables sont-elles vouées à l’échec?
Défis et réussites face aux géants de la fast fashion
08 Novembre 2024
Début septembre, la marque 100% recyclée Hopaal a mis la clé sous la porte, huit ans après son lancement et ce, malgré ses débuts prometteurs. Selon son communiqué, l’entreprise française n’aurait pas survécu à la crise du secteur textile, qui a rendu la situation irrémédiablement compromise. Il s’agit malheureusement d’une histoire qui se répète pour de nombreuses marques de mode durable. Malgré une sensibilisation sociale accrue aux impacts environnementaux de la fast fashion, des questions se posent quant à la viabilité des modèles économiques de la mode éco-consciente. Ont-elles une chance face aux géants de la fast fashion ? Une interrogation qui est d’autant plus cruciale en temps de crise dans le secteur de l’habillement.
En général, le modèle économique des marques durables repose sur l’utilisation de matériaux écologiques ou durables, une transparence et une traçabilité sur la chaîne de production et entre autres, un modèle de production en petite quantité pour éviter le gaspillage. Inévitablement, le prix du produit final s’élève à un montant relativement supérieur à celui de la fast fashion avec une marge plus maigre. La question primordiale est: comment convaincre le public, surtout en temps d’inflation, de dépenser 150 € pour un t-shirt blanc alors que les marques de fast fashion le vendent à 5€? Malheureusement, il semble que la conscience écologique ne suffise pas à dissuader les consommateurs de se tourner vers des marques comme Zara, qui, hormis pendant la période du Covid, continue de croître. En 2023, ses ventes ont atteint un sommet de 26 milliards d’euros, d’après les données de Statista. Des chiffres impressionnants, à une époque où le pouvoir d’achat de la classe moyenne ne cesse de plomber. Dans ce contexte inflationniste, le futur des marques écologiques paraît compromis car durable rime avec cher. Hopaal rejoint une longue liste de marques éthiques qui n’ont pas réussi à survivre le marché telle que Zady, une marque de mode durable pionnière aux États-Unis qui a dû fermer ses activités après 4 ans malgré un bon accueil initial.
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Toutefois, dans cette atmosphère décourageante, il existe également des success story comme la célèbre marque étasunienne éco-responsable Reformation. L’entreprise fondée par Yael Aflalo a doublé ses ventes en seulement quatre ans, atteignant 300 millions de dollars en 2023. Reformation est parvenu à s’imposer dans le paysage impitoyable de la mode notamment grâce à ses robes chics et à sa capacité à attirer une audience jeune. « Ils s'identifient à des marques qui ont une voix et qui représentent quelque chose. En restant fidèles à ces principes fondamentaux que nous avons établis au cours des 10 à 15 dernières années, nous avons vraiment pu attirer un public de la génération Z. » explique la fondatrice, interrogée par la National Retail Federation. La marque qui investit dans des technologies propres et dans la réduction des émissions de carbone, a réussi à rendre tendance l’engagement écologique auprès des célébrités et des jeunes.
À une échelle plus modeste, la marque française Maison Cléo se distingue également en proposant des pièces slow fashion uniques mêlant vintage et sexy. Ces dernières sont prisées par des célébrités telles qu’Angèle ou Emily Ratajkowski. Le label fondé en 2015 par Marie Dewet et sa mère est passé de vendre ses pièces sur Instagram à participer à la Paris Fashion Week. Une évolution plus qu’ impressionnante pour une petite marque avec 3 couturières seulement. De plus, Maison Cléo défie les standards de la fast fashion en affichant par exemple les détails de coûts de production de ses produits comme dans ce post Instagram. Une transparence rafraîchissante à l’ère où des géants comme Shein cultivent l’opacité sur leurs pratiques de fabrication et de tarification. Cette démarche permet à l’entreprise française de renforcer la confiance de sa clientèle en offrant un modèle d’authenticité, en contraste frappant avec les pratiques souvent critiquées de l’industrie de la mode rapide. Ces marques montrent que la mode durable peut être à la fois tendance et rentable, apportant une lueur d’espoir pour un changement systémique. Cependant, la concurrence reste féroce face aux magnats de la fast fashion. Survivre dans cet environnement exige une résilience à toute épreuve, une créativité constante et une capacité à nouer des liens authentiques avec son public.