Chanel débouté face à une marque de beauté slovène
L'icône du luxe affronte un défi inattendu devant l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle
16 Luglio 2024
100 ans après la création de Chanel N°5, il n'existe toujours pas de senteur plus célèbre au monde ni de flacon autant reconnaissable. Pourtant, même les icônes ne sont pas à l’abri des batailles juridiques. Chanel, fort de son prestigieux N°5, se voit aujourd'hui débouté par l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) dans une affaire l'opposant à la marque slovène M5. Une décision qui remet en question la suprématie de Chanel dans la protection de ses symboles. Créé en 1921 par Gabrielle "Coco" Chanel, ce parfum a su captiver les sens et les esprits pendant plus d’un siècle. Associé à des visages célèbres comme Marilyn Monroe, il est devenu un véritable symbole de luxe et de raffinement. Le chiffre 5, au-delà d’un simple numéro, incarne l’essence même de la marque, apparaissant dans de nombreuses campagnes et produits. Mais voilà qu’une petite société slovène, Simb D.O.O, a décidé de jouer dans la cour des grands. En déposant la marque M5, cette entreprise espérait percer sur le marché des cosmétiques avec un logo mettant en avant un 5 stylisé autour de la lettre M. Chanel, percevant une menace, a rapidement réagi en septembre dernier, déposant une demande d'opposition auprès de l'EUIPO. Pour la maison de luxe, il était impensable de laisser un "M5" empiéter sur son territoire sacré.
Dans cette affaire, la marque française a déployé toute sa panoplie de preuves pour convaincre l'EUIPO. Des brochures publicitaires aux photographies de vitrines, en passant par des copies de pages Wikipédia, tout y était pour démontrer l’importance du chiffre 5 dans son univers. L’argument clé ? Le risque de confusion. La maison de la rue Cambon a insisté sur le fait que le 5, en tant que symbole, était indissociable de son identité visuelle et de son prestige. Le logo de M5 ressemble trop au sien, une ressemblance qui pourrait induire en erreur le consommateur et diluer l’image de sa marque emblématique. En d’autres termes, M5 pourrait profiter de l’aura de Chanel N°5, ce qui serait une injustice pour une marque ayant tant investi dans la construction de son image. Malgré sa force de persuasion, l’EUIPO n’a pas été convaincue. Le 17 juin, l’office a rendu son verdict : aucune confusion possible entre les deux marques. Selon l'EUIPO, le logo de M5, bien que stylisé, ne porte pas atteinte aux droits de Chanel sur son N°5. La décision repose sur un constat simple : les preuves apportées n’étaient pas suffisamment distinctives. Les spécialistes ont également noté un manque crucial dans les arguments de Chanel : l'absence d'informations quantitatives sur les ventes et l'exposition du public à la marque N°5. Sans ces données, il était impossible de prouver que le consommateur associerait automatiquement le chiffre 5 à cette dernière. Un coup dur pour la maison de luxe, qui doit revoir sa stratégie de défense.
Cette décision est un revers juridique mais aussi symbolique. Elle révèle les difficultés auxquelles les grandes marques de luxe sont confrontées pour protéger leurs icônes. La défaite de Chanel pourrait encourager d'autres entreprises à tester les limites de la propriété intellectuelle, voyant là une opportunité d’émerger sur le marché avec des éléments visuels proches des grandes marques. Pour Simb D.O.O, c'est une victoire significative. La marque slovène pourra désormais commercialiser ses produits cosmétiques sous le nom M5, profitant d’une notoriété indirecte liée à la similarité visuelle avec Chanel N°5. Une porte ouverte vers de nouvelles opportunités commerciales dans un marché concurrentiel. Plus largement, cette affaire interpelle l'industrie du luxe en soulignant la nécessité pour les grandes maisons de redoubler d’efforts dans la protection de leurs marques. La vigilance et la proactivité deviennent des impératifs pour éviter de telles confrontations à l'avenir. Malgré cette défaite, plusieurs sources ont révélé que la Maison française pourrait faire appel de la décision, cherchant à renverser le verdict en présentant de nouveaux arguments ou en rassemblant davantage de preuves quantitatives sur l’impact de son parfum. Au-delà de l’appel, Chanel devra peut-être repenser sa stratégie de protection de marque. Cette affaire souligne grandement l'importance d'une régulation claire et rigoureuse pour protéger les marques tout en permettant une concurrence équitable.